2 octobre 2016

Comment Charles Martel créa la conscience européenne à Poitiers

Par Nicolas Bonnal

 

On a parfois de vraies surprises, ainsi celle-ci : Jean Flori, auteur de Chevaliers et chevalerie au Moyen Âge, publié par Hachette.

Page 31, cet universitaire écrit : « Les menaces que font peser sur l’Europe chrétienne les incursions sarrasines, normandes et hongroises conduisent par ailleurs l’Église à diaboliser ces ennemis et à valoriser leurs opposants chrétiens. »

Jean Flori ajoute plus loin : « La papauté ne s’y trompe pas. Elle voit d’un œil favorable les efforts de “pacification” entrepris par Charles en Germanie, où prêchent les missionnaires anglo-saxons de Boniface. Elle se réjouit de sa victoire contre les musulmans à Poitiers, saluée par les chrétiens de Cordoue comme celle des “Européens”, premier indice d’un sentiment communautaire et preuve que “l’opinion” voit en lui le véritable maître de l’Occident et le champion de la chrétienté. »

La note fait allusion à l’Anonyme de Cordoue, texte rédigé en latin présenté par le jésuite Tailhan en 1885.

Je cite la traduction du site Sources Médiévales : « Abd-el-Rahman, voyant la terre pleine de la multitude de son armée, franchit les montagnes des Basques et, foulant les cols comme les plaines, s’enfonça en pillant à l’intérieur des terres des Francs… Abd-el-Rhaman en poursuivant le susdit duc Eudes décide d’aller piller l’église de Tours en détruisant sur son chemin les palais et en brûlant les églises. Lorsque le maire du palais d’Austrasie en France intérieure, nommé Charles, homme belliqueux depuis son jeune âge et expert dans l’art militaire, prévenu par Eudes, lui fait front. À ce moment, pendant sept jours, les deux adversaires se harcèlent pour choisir le lieu de la bataille, puis enfin se préparent au combat… »

Les Francs ne font pas dans la dentelle : « Les gens du Nord demeurant à première vue immobiles comme un mur restent serrés les uns contre les autres, telle une zone de froid glacial, et massacrent les Arabes à coups d’épée. Mais lorsque les gens d’Austrasie, supérieurs par la masse de leurs membres et plus ardents par leur main armée de fer, en frappant au cœur, eurent trouvé le roi, ils le tuent ; dès qu’il fait nuit, le combat prend fin, et ils élèvent en l’air leurs épées avec mépris. »

Enfin, vient la douce surprise de l’Anonyme de Cordoue. L’auteur chrétien et hispanique y évoque les Européens.

« Puis le jour suivant, voyant le camp immense des Arabes, ils s’apprêtent au combat. Tirant l’épée du fourreau, au point du jour, les Européens observent les tentes des Arabes rangées en ordre comme les camps de tentes avaient été disposés. Ils ne savent pas qu’elles sont toutes vides ; ils pensent qu’à l’intérieur se trouvent les phalanges de Sarrasins prêtes au combat ; ils envoient des éclaireurs qui découvrirent que les colonnes d’Ismaélites s’étaient enfuies. Tous, en silence, pendant la nuit, s’étaient éloignés en ordre strict en direction de leur patrie. Les Européens, cependant, craignent qu’en se cachant le long des sentiers, les Sarrasins ne leur tendent des embuscades. Aussi, quelle surprise lorsqu’ils se retrouvent entre eux après avoir fait vainement le tour du camp. Et comme ces peuples susdits ne se soucient nullement de la poursuite, ayant partagé entre eux les dépouilles et le butin, ils retournent joyeux dans leurs patries (vers 1376 à 1437). »

Je rappelle dans mon livre sur le Graal (1) le lien qui unit Compostelle à la chanson de geste. Les chansons sont écrites en pleine conscience et connaissance de la géographie espagnole. Joseph Bédier consacre un beau livre à cette question transcendentale. C’est sur la chronique de Turpin qui est le guide de voyage de Compostelle.

« Or, Charlemagne, ayant usé sa vie à combattre les Sarrasins par toutes les régions de la terre, était las et ne songeait plus qu’au repos, quand une nuit il vit un chemin d’étoiles qui commençait à la mer de Frise et, traversant les pays, la Gascogne, la Navarre et l’Espagne, courait dans le ciel jusqu’en Galice… »

 

Note

(1) La chevalerie hyperboréenne et le Graal, éditions Dualpha, collection « Insolite », 282 pages. Pour en savoir plus, cliquez ici.

http://francephi.com/boutique/edition-dualpha/la-chevalerie-hyperboreenne-et-le-graal/

La chevalerie hyperboréenne et le Graal, éditions Dualpha.

La chevalerie hyperboréenne et le Graal, éditions Dualpha.

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