21 janvier 2017

Emmanuel Macron et Patrick Drahi : les liaisons dangereuses

Par Nicolas Gauthier

Dimanche 15 janvier dernier, deuxième round de la primaire de la gauche, Arnaud Montebourg s’offre un petit plaisir à peine coupable en s’en prenant bille en tête à ces médias devenus propriété de groupes industriels. Nous sommes sur BMFTV : Ruth Elkrief accuse donc le coup, mais ne pipe mot, tandis que Laurence Ferrari d’i-Télé, se sent obligée de dire sa fierté de travailler pour la chaîne en question, propriété de Vincent Bolloré.

Étrange silence, tout de même, que celui de la première, sachant que BFMTV fait partie, au même titre que Libération, RMC et i24, du holding de Patrick Drahi, Altice, également propriétaire de SFR. Tout cela est parfaitement officiel, mais plus officieux a été, en octobre 2016, le départ de Bernard Mourad, dans l’équipe d’Emmanuel Macron, en tant que « conseiller spécial des relations avec les sphères économiques »…

Là, ce n’est même plus le mélange des genres, mais la consanguinité revendiquée. D’ailleurs, du temps où Arnaud Montebourg était à Bercy, il s’était inquiété du rachat de SFR par Numericable, l’une des sociétés de Patrick Drahi en ces termes : « Numericable a une holding au Luxembourg, son entreprise est cotée à la Bourse d’Amsterdam, sa participation personnelle est à Guernesey dans un paradis fiscal de Sa Majesté la reine d’Angleterre, et lui-même est résident suisse ! Il va falloir que M. Drahi rapatrie l’ensemble de ses possessions, biens, à Paris, en France. Nous avons des questions fiscales à lui poser ! » Ambiance.

À propos d’ambiance, Patrick Drahi n’a pas son pareil pour la plomber. En mai 2015, la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale l’auditionne en tant que président-directeur général du groupe Altice. Et, à propos de compétitivité économique, de salaire et de congés payés, il assure : « Les Chinois travaillent 24 heures sur 24 et les Américains ne prennent que deux semaines de vacances […] C’est là, le problème pour nous […] Mon modèle, ce n’est pas les deux semaines de congés payés, mais par rapport à ceux qui travaillent plus, on avance moins vite : ce sont les lois de la gravitation, si vous le permettez… » Fibre sociale, quand tu nous tiens !

De nombreux commentateurs de la chose politique remarquent qu’Emmanuel Macron n’a pas encore de véritable programme économique ; Patrick Drahi, par l’intermédiaire de Bernard Mourad, paraît tout désigné pour pallier ce déficit. D’ailleurs, celui qui parle le mieux de cet homme, demeure celui qui le connaît plus que bien, Bernard-Henri Lévy qui, lors d’une allocution prononcée le mercredi 18 mars 2015, à l’occasion de la remise à Patrick Drahi du Prix Scopus de l’Université Hébraïque de Jérusalem, affirme : « Français d’âme et de cœur et ressortissant suisse, citoyen israélien né à Casablanca, Citizen Drahi régnant sur ce territoire sans limite ni frontière que nous assignent les technologies dont vous êtes l’industriel, vous êtes aussi l’un de ces “Gidiens” [On se demande bien ce que les lecteurs d’André Gide viennent faire dans ce boutre ? NDLR] que “l’idéologie française” réprouve depuis un siècle, mais dont nous avons cruellement besoin en ces temps de lourdeur indigène et d’étouffement chauvin – vous êtes l’un de ces citoyens du monde impossibles à assigner à une “souche”, à enfermer dans une appartenance, à épuiser dans l’un de ces trois “n” (le natal, le national, le naturel) dont j’ai dit, dans un texte récent, combien ils appauvrissent cette humanité dont vous venez, vous-même, de nous rappeler qu’elle n’exerce encore qu’une très infime partie de son infinie capacité d’intelligence et de pensée – et, pour cela aussi, je vous salue. »

Ite Missa Est et voilà qui va toujours mieux en le disant.

La véritable nature d’Emmanuel Macron, voilà peut-être ce que voulait évoquer Arnaud Montebourg, à mots couverts, dans cet échange pour le moment passé sous silence par les médias dominants. Mais comment exiger de ces derniers qu’ils se tirent une balle dans le pied ? Et quand on parle de pied, c’est juste histoire de demeurer poli. Il est à craindre, pour cet infernal tandem Macron/Drahi, que les électeurs le soient un peu moins en avril prochain…

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Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.

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