5 juin 2017

Le Brexit fut-il une bonne idée ?

Par Aristide Leucate

 

« L’Écosse doit pouvoir choisir son avenir, choisir de suivre le Royaume-Uni sur le chemin du Brexit ou de devenir indépendante », a déclaré la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, devant des centaines de partisans, réunis à Perth (centre de l’Écosse) lors de la présentation du programme du Parti national écossais (SNP) en vue des élections législatives du 8 juin prochain.

L’enjeu n’est pas mince pour Mme Sturgeon qui espère bien remporter la majorité des sièges (soit 37 sur 72) dévolus à l’Écosse au sein de la chambre des Communes. Ainsi, clame-t-elle, « toute tentative de la part des Tories [conservateurs] pour empêcher l’Écosse d’exprimer son choix […] serait démocratiquement insoutenable ».

Pour parfaite information, on mentionnera le premier référendum sur l’indépendance de l’Écosse du 18 septembre 2014 qui s’était soldé par un échec (55,3 % des suffrages exprimés en faveur du « non » contre 44,7 % pour le « oui »). Un récent sondage Yougov effectué auprès de 1 032 personnes le 18 mai dernier, indique que 39 % des Écossais souhaiteraient que l’Écosse, nation autonome du Royaume-Uni, accède à l’indépendance. Le Premier ministre écossais amplifie ce pourcentage en rappelant que lors du référendum du 23 juin 2016, l’Écosse avait voté à 62 % contre le Brexit, adopté par près de 52 % des électeurs britanniques.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser de ce côté-ci de la Manche, le Parti national écossais n’est nullement un parti populiste et souverainiste, à l’instar d’un FN français ou même de l’UKIP britannique anciennement dirigé par l’actuel député européen Nigel Farage. Ses positions sont très clairement progressistes – ce qui le classerait à « gauche » de notre échiquier politique, entre le parti socialiste et l’UDI –, sociales-libérales (notamment sur le plan des mœurs) et, surtout, farouchement et activement européiste.

Historiquement, L’Écosse doit son rattachement au Royaume d’Angleterre (qui comprenait alors le pays de Galles) par les actes d’Union (The Acts of Union) de 1707. Cette intégration n’effaçait pas pour autant le souvenir des douloureuses guerres d’indépendance qui opposèrent l’Écosse à sa rivale anglaise et dont le remarquable film Braveheart de Mel Gibson relata, certes de manière très romancée, les exploits et hauts faits d’armes de William Wallace.

Autant dire que subsistent dans la mémoire collective les traces d’une lointaine histoire marquée au coin de l’irrédentisme comme des vieilles rancunes encore solidement accrochées aux vieilles pierres des Highlands.

L’arrivée au pouvoir du travailliste Tony Blair en 1997 constitua un véritable tournant puisque le Premier ministre anglais permit la renaissance du Parlement d’Écosse à Édimbourg, ce, au nom d’une politique renforcée de régionalisation gravée dans le marbre du Dévolution Act. Comme le souligne pertinemment le politologue Pierre Hillard, « le Premier ministre anglais a réveillé des ambitions écossaises assoupies après trois siècles de domination anglaise sans complexe. Désormais, il faut ‘‘passer à la caisse’’. »

Le prix à payer n’est pas modique, et l’Écosse n’aura aucun scrupule à jouer de l’effet de levier sur les institutions de Bruxelles pour faire plier Londres.

La locataire du 10 Downing Street, Theresa May, hérite donc de la politique inconséquente de son prédécesseur qui a inconsidérément ouvert la boîte de Pandore, lors même qu’elle doit, dans le même temps, affronter l’Union européenne, son opposition et une partie de son propre camp dans les âpres négociations de sortie de son pays de l’UE. C’est peu dire que les législatives du 8 juin sont attentivement suivies des deux côtés de la Manche, Bruxelles et Glasgow priant pour que Mme May soit électoralement enterrée.

De là à en conclure que le Brexit fût une fausse bonne idée… Réponse sous huitaine.

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Philippe Randa,
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