6 novembre 2016

Confusion & tumulte aux États-Unis

Par Euro Libertes

Entretien avec le géopolitologue Jacques Borde, paru sur le site VoxNr.

La dernière ligne droite avant l’élection du 8 novembre 2016 voit interagir sur un enjeu, a priori seulement politique, des acteurs que l’on attendait pas au tournants : ces MM. Du Renseignement, avec en première le… FBI !

Présidentielles ou pas : êtes-vous surpris par la descentes aux enfers des Clinton ?

Non, pas du tout. Et, sincèrement, comment pourrait-on l’être ?

Comme l’a noté Eber Addad, dont je publie les chroniques sur mon Blog BforBorde : « Depuis des mois plusieurs publications ont affirmé qu’  était vendue aux monarchies pétrolières et c’était sans cesse démenti par la presse “traditionnelle”, maintenant c’est confirmé par la plus traditionnelle de la presse, Reuters qui, de plus, est 100 % pro Clinton !!! Un agent du Qatar et  à la Maison-Blanche, secondée par un membre des FM ! Et après on s’étonne des désastres en séries! Cette femme est dangereuse… ».

C’est pourtant simple à comprendre. Dommage qu’il a fallu autant de temps pour certains de s’en apercevoir. Mais, il est vrai que les pétrodollars ont parfois un curieux effet sur la mémoire et la déontologie, vous ne trouvez pas ?

Et que va-t-il se passer si c’est Hillary Clinton qui gagne les élections ?

Son mandat est sérieusement compromis avant même de commencer. À terme, et court terme même, je pense que Clinton-présidente va avoir à faire face à une procédure d’impeachment qui plombera toutes ses initiatives. Après…

Et, il y a quoi de compromettant dans la corbeille d’Hillary Clinton ?

Comme nous n’en sommes qu’au début des vraies investigations, des choses encore éparses, dirai-je. Mais, déjà du lourd…

Comme quoi ?

D’ores et déjà, la Clinton Foundation a dû reconnaître le versement d’un don (sic) d’un million de dollars du Qatar. Avec deux éléments à charge :

1- Hillary R. Clinton était bien, au moment de ce versement, la US Secretary of State ;
2- Là encore, Hillary R. Clinton n’a pas jugé opportun d’en aviser le US State Department. Un de ses nombreux trous de mémoire, sans doute !

Autre dossier qui enfle : Hillary Clinton & l’affaire de Benghazi ?

Celle qui a coûté la vie l’ambassadeur J. Christopher Stevens(1) et à un employé du US Department of State, pour être précis. C’est tout le volet des courriels cachés d’Hillary R. Clinton, alors aux Affaires étrangères. Utilisant un serveur privé non sécurisé, Hillary R. Clinton a, à plusieurs reprises, indiqué ou se trouvait J. Christopher Stevens. Tout ceci avec des éléments plus qu’utiles aux ennemis de l’Amérique et à ces réseaux takfirî pour qui Stevens était une cible légitime. A legitimate target !

De ce fait, la communauté du Renseignement, le FBI étant simplement la juridiction concernée en pareil cas, estime highly probable (hautement probable) que ce sont bien ses courriels qui ont permis aux terroristes takfirî de taper aussi efficacement J. Christopher Stevens.

Pour devancer la question qui vous brûle les lèvres : cette opinion se fonde, en fait, sur cinq courriels :

– 23 mars 2011. Alors, Deputy Chief of Staff d’Hillary Clinton, Jacob Jeremiah Jake Sullivan l’avertit de l’arrivée prochaine de J. Christopher Stevens dans l’Est de la Libye. Cf. Quelqu’un dénommé Bill « was “trying to make sure Chris Stevens gets into E. Libya » »… Était en train de s’efforcer de faire rentrer Chris Stevens en Libye, en français.
– 27 mars 2011. Un courriel du US State Department est expédié à Hillary R. Clinton, sur son serveur privé. Cf. « The current game plan is for Mr. Stevens to move no later than Wednesday from Malta to Benghazi. He will stage off shore initially for a one day visit during which he will have meetings with TNC interlocutors and get a sense of the situation on the ground. The goal of this one day trip is for him to lay the groundwork for a stay of up to 30 days ». Est clairement indiqué quand et où Stevens va se rendre à Benghazi. Ainsi que la mission que celui-ci doit accomplir pour son ministère.
– 8 avril 2011. Autre courriel du US State Department. Cf. « Security situation in Benghazi remains quiet. Chris Stevens & team are in the hotel, moving only for meetings as required ». Précisions mortelles quant au positionnement et aux déplacements de l’ambassadeur J. Christopher Stevens.
– 11 avril 2011. Autre courriel du US State Department. Cf. « The situation in Ajdabiyah has worsened to the point where Stevens is considering departure from Benghazi. The envoy’s delegation is currently doing a phased checkout ». Une situation qui s’aggrave, mais dont les éléments factuels arrivent toujours sur le serveur non sécurisé d’Hillary R. Clinton.
– 24 avril 2011. Dernier courriel du US State Department. Cf. « Stevens will be meeting with MFA in one hour and will make a written request for better security at the hotel and for better security-related coordination. He still feels comfortable in the hotel. They are looking into the idea of moving into a villa, but that is some way off ». Là, la position de Stevens et son escorte est donnée pratiquement en temps réel. La suite, on la connaît…

À se demander, d’ailleurs, comment les tueurs takfirî n’ont pas agi plus tôt. Ajoutez à ça le tropisme interventionniste qui caractérise Hillary R. Clinton. Avouez que nous sommes servis.

À propos de Jacob Sullivan. Il est évident qu’il est aussi dans le collimateur de cette communauté du Renseignement opposée à Clinton. Aligner, Sullivan, donné comme le mieux placé pour occuper le poste de US National Security Advisor dans une administration Clinton à venir, c’est comme le dit le dicton : Killing two birds with one stone. En français : faire d’une pierre deux coups !

Et Trump les inquiète moins, vos barbouzes ?

À se fier à ses déclarations, non. Beaucoup moins, en tout cas. Que nous dit, sur ce sujet, le candidat républicain ? Que « Nous recourrons à la force militaire seulement en cas de nécessité vitale pour la sécurité nationale des États-Unis. Nous mettrons fin aux tentatives d’imposer la démocratie en dehors des USA et de renverser les régimes, ainsi que de nous impliquer dans des situations dans lesquelles nous n’avons aucun droit de nous ingérer ».

Enfin un homme raisonnable à la tête de ce pays. Il était temps. Surtout avec un hegemon US passablement essoré financièrement.

Sinon, que pensez-vous des fuites distillées par Julian Assange ?

Elles semblent assez intéressantes. Même si je me demande si le tempo est bien le bon.. ?

Que voulez-vous dire ?

Qu’en fait, beaucoup d’Américains ont déjà une idée bien arrêtée de leur vote. Et je ne suis pas certain que des révélations de dernière minute, pour accablantes qu’elles soient, y changeront forcément quelque-chose. Bon, évidemment, il y a les 15 %, 20 % d’indécis…

Et sur ce que nous dit Assange ?

C’est passionnant. Surtout lorsqu’il nous révèle que « Les Séoudiens, les Qataris, les Marocains, les Bahreïnis, surtout les deux premiers, donnaient tout cet argent à la Fondation Clinton, alors qu’Hillary Clinton était secrétaire d’État et que le Département d’État approuvait des ventes d’armes massives, en particulier à l’Arabie Séoudite ». Notons que ce sont, pour partie, ces ventes d’armes qui contribuent au massacre de la population civile au Yémen, et plus précisément l’usage indiscriminé qu’en font les troupes de roi d’Arabie Séoudite, Salmān Ibn-ʻAbd al-ʻAzīz Āl-Séʻūd.

Là, encore un intéressant volet judiciaire qui pourrait s’ouvrir pour Hillary R. Clinton.

Comment cela ?

Je vous rappelle que Donald J. Trump nous a déjà assuré que, s’il était élu, il s’offrirait le scalp de Nicolas Sarkozy, pour sa via factis en Libye. Alors, pourquoi pas celui d’Hillary pour ses ventes d’armes à Riyad ? Au fond, c’est du même usage immodérée de la géopolitique dont il s’agit.

Note

(1) Stevens est le premier ambassadeur US tué dans l’exercice de ses fonctions depuis 1979.

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Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.

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