16 novembre 2016

Élites en perdition

Par Richard Dessens

 

Depuis quelque temps, la question des élites se fait plus pressante. La poussée des « populismes » notamment depuis une quinzaine d’années, ravive les contestations des élites.

Les discours de nos élites occidentales tendent à minimiser et avilir cette contestation dont elles sont l’objet. En ce sens, elles ne cessent de marteler que les votes « populistes » représentent les moins diplômés, les plus pauvres, les rejetés de la mondialisation, bref une sorte de peuple qui compte moins que celui des intelligents, des riches, des diplômés, des mondialistes, qu’elles représentent.

Il y aurait ainsi deux sortes de citoyens : une catégorie supérieure, celle qui vote bien et une autre de « sous-citoyens » qui vote mal. Dans ce bel élan de démocratie qui caractérise nos élites, elles ajoutent régulièrement un argument qui semble ne choquer personne. Il consiste à répéter que, finalement, à bien y regarder, les mauvais citoyens ne représentent qu’une petite minorité, si on tient compte d’une abstention massive globale.

Argument primaire, mais redondant qu’on pourrait évidemment utiliser pour toute élection, même celle des « bons » citoyens. Un journaliste de premier plan, Christophe Barbier, de L’Express, disait après l’élection de Donald Trump que ce n’est pas parce qu’une majorité d’Américains avait voté pour lui que ce n’était pas un « animal » dangereux. La preuve de l’esprit démocratique de nos élites n’est plus à faire. Quel mépris !

C’est que nos élites sont en réalité en bout de course. C’est là le point essentiel qui ressort de ces dernières années. Ces élites qui s’accrochent à un pouvoir né après-guerre et qui dure depuis plus de 70 ans. Si les votes actuels (Pologne, Hongrie, Grande-Bretagne, USA, etc.) sont qualifiés d’« anti-système », c’est bien que les pays occidentaux sont en train de changer de système, ce qui est intolérable pour les élites… du système. L’éternelle loi de Pareto est de retour : le renouvellement des élites s’accompagne toujours de bouleversements, voire de révolutions lorsque les anciennes élites s’agrippent désespérément à leur pouvoir.

Que 5 % de la population détiennent 95 % des richesses d’un pays – autre loi de Pareto – ne semble non plus choquer personne lorsque les votes « anti-système » se développent.

Tout pays a besoin d’élites, la vraie question reposant sur la nature de ces élites et de leur renouvellement, malheureusement totalement verrouillé depuis des dizaines d’années.

Alors les élites en place utilisent tous les arguments de mauvaise foi pour se sauvegarder elles-mêmes, se parant du monopole de l’intelligence, dégradant de plus en plus violemment leurs adversaires à faible quotient intellectuel.

Il n’est pas question de laisser de nouvelles élites s’installer au pouvoir, ces élites primaires, espèces de faux Tsars catastrophiques. Les vieilles élites ne peuvent admettre une autre intelligence que la leur. C’est ainsi que le débat politique n’existe plus et est remplacé par des anathèmes, des excommunications primaires, un mépris de plus en plus violent de la part de nos élites en place.

C’est le signe d’une fin du monde de l’après-guerre et d’une vague d’élites nouvelles qui avancent vers un nouveau monde occidental en recomposition.

Oui, il existe des milliers de gens au moins aussi intelligents et cultivés que nos « élites » et qui osent penser aujourd’hui autrement qu’elles.

Qu’on cesse de brandir cette « intelligence » brillante de nos journalistes, people et politiques formatés. Cette intelligence qui fait mourir à petits feux les peuples occidentaux. Cette intelligence qui paralyse l’action, étouffe les initiatives, nuance à l’excès toute réflexion jusqu’à rendre inopérant tout commencement de décision concrète.

Il faudra encore supporter de lire, de voir et d’entendre nos intellectuels pérorer sur les mêmes thèmes sempiternels, psalmodier les mêmes litanies condescendantes, aligner les mêmes arguments à cent lieues des réalités des peuples et de leur devenir, mais avec de doctes mots de cuistres. Mais que ne feront pas nos « élites » pour conserver leur pouvoir ?

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Philippe Randa,
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