1 juillet 2017

Union européenne : contrôle des investissements étrangers

Par admin

Lors du Conseil européen du 22 juin, la majorité des États membres de l’Union européenne se sont opposés à la proposition de Paris, Berlin et Rome de renforcer le contrôle des investissements étrangers au niveau européen, « soucieux » – disent-ils – de ne pas alimenter le protectionnisme européen, alors que l’actuel président français avait promis, durant sa campagne, de se battre pour « une Europe qui protège » : il insistait alors, sur l’importance de la politique commerciale dans sa stratégie européenne.

Alors que les entreprises européennes ont un accès restreint aux marchés étrangers, elles se font souvent racheter par des sociétés étrangères, surtout chinoises. Notons que la position de Paris pour un contrôle européen des investissements étrangers était soutenue par l’Italie et l’Allemagne.

Les trois gouvernements avaient ainsi appelé en février 2017 à ce que l’UE reçoive plus de pouvoir sur les investissements étrangers stratégiques et puissent surveiller, voire bloquer, des rachats.

Malheureusement, le 22 juin, lors du sommet, une majorité d’États membres a cependant décidé d’alléger la proposition avancée par la Commission dans le cadre d’un « document de réflexion » sur la mondialisation publié en mai.

Macron bien seul sur le contrôle des investissements chinois

Hélas, trois fois hélas, une proposition d’Emmanuel Macron de laisser plus de pouvoir à Bruxelles pour contrôler les acquisitions chinoises dans l’Union européenne, afin de protéger les secteurs stratégiques, a été repoussée par ses partenaires.

Les conclusions du sommet indiquent que le Conseil « salue l’initiative de la Commission visant à maîtriser la mondialisation et, entre autres, à analyser les investissements réalisés par des pays tiers dans des secteurs stratégiques, dans le plein respect des compétences des États membres », sur lequel il reviendra lors d’une rencontre ultérieure.

Ainsi donc, les conclusions acceptées par les États membres sont très éloignées de la proposition des trois pays de mettre en place un mécanisme européen en mesure d’opposer son véto aux rachats étrangers. Le passage qui demandait à la Commission de « se pencher sur des moyens de déceler et de vérifier les investissements de pays tiers dans les secteurs stratégiques » a également été supprimé.

Le texte final constitue une forte déconvenue pour la France. Lors des discussions, un groupe d’États, comprenant notamment le Portugal, l’Espagne, la Grèce et les pays nordiques, s’est opposé aux propositions du président français.

L’UE n’envisage pas de véto aux investissements stratégiques étrangers

Les dirigeants européens vont « discuter » des possibilités de vérification des investissements étrangers au Conseil européen ; mais une proposition plus radicale pour un système de véto européen des rachats étrangers reste pour l’instant exclue.

Ces États craignent notamment d’envoyer « le mauvais message » aux investisseurs, alors même que l’UE a tellement besoin d’eux. En outre, ont-ils ajouté, la protection des secteurs stratégiques relève des compétences des États membres, étant donné qu’elle est définie par les circonstances spécifiques à chaque pays. Une dizaine d’États membres envisagent de prendre des mesures pour bloquer les rachats étrangers dans des secteurs cruciaux, comme la défense ou dans des circonstances touchant à l’intérêt général.

Si la proposition de l’Allemagne, de la France et de l’Italie n’a pas obtenu le soutien des autres États membres, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont cependant insisté sur l’amélioration du cadre de contrôle des investissements stratégiques et le renforcement des outils antidumping.

« Nous devons nous assurer que le principe de libre concurrence est respecté, ce n’est pas la loi de la jungle », a déclaré le président français après le sommet. L’Europe reste « très favorable » à l’ouverture des marchés, mais cela ne veut pas dire que « nous serons naïfs », a-t-il ajouté.

D’un point de vue plus général, la chancelière allemande a indiqué que « nous voulons changer l’UE afin qu’elle soit plus résistante face à la mondialisation », alors que pour les pays qui s’opposent à tout processus de contrôle, le mécanisme européen apparaît comme une option trop radicale.

Des sources ont révélé que Jean-Claude Juncker, le président de la Commission, entend préciser ce qui pourrait et devrait être fait au niveau européen lors de son discours sur l’état de l’Union, en septembre. Le sujet du contrôle des investissements étrangers est en effet analysé en interne à la Commission. L’exécutif pourrait par exemple avoir un rôle à jouer en cas de menace à la concurrence sur le marché interne.

Quelles leçons tirer ?

À l’évidence, les trois plus grands pays de l’Union européenne, aussi légitime soit leur démarche, ne peuvent contrer, en raison du processus décisionnel européen, l’alliance des « petits » et ceci permet à certains états intermédiaires, comme la Pologne ou l’Espagne, de renforcer leur rôle,

Les promesses faîtes par l’actuel président français durant la campagne, risquent fort d’avoir du mal à se concrétiser au niveau européen, ne serait-ce que du fait du processus décisionnel de l’UE.

Il est plus nécessaire que jamais – et le traité de Lisbonne l’autorise – que les pays qui veulent avancer, puissent le faire sans être freinés par d’autres, notamment en matière de politique de défense et de protection des technologies européennes,

Comme lors de ce Sommet européen, la demande faite à la Commission de « se pencher sur des moyens de déceler et de vérifier les investissements de pays tiers dans les secteurs stratégiques » a été supprimée, force est d’admettre que l’on se dirige, ici vers un « moins-disant » « unanimiste » s’appuyant sur une vision inversée du concept de subsidiarité, au motif qu’un sujet ne relèverait pas directement des traités. Les mêmes états qui se réfèrent à cette pratique d’évacuation d’une décision commune, seront les premiers à dénoncer les décisions individuelles d’un état membre ou d’un groupe d’états membres d’avancer seuls sur la Défense européenne par exemple.

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Philippe Randa,
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