14 janvier 2017

Pierre Drieu La Rochelle, Chroniques des années trente

Par Rémi Tremblay

On croit avoir tout lu d’un auteur et soudainement, un éditeur publie une collection d’articles qui avaient été disséminés ici et là qui nous donne une nouvelle perspective sur l’auteur en question. C’est ce qui m’est récemment arrivé avec la publication des Chroniques des années 30 de Pierre Drieu La Rochelle, ouvrage regroupant trente-deux textes publiés originellement dans une kyrielle de publications comme Le Figaro, Marianne, Nouvelles Littéraires, la Revue Européenne et Écrits Nouveaux entre mai 1928 et mars 1941.

Ils furent réunis et sont présentés par Christian Dedet, épris très jeune de l’œuvre de Drieu, et ce, bien avant que l’auteur réprouvé ne soit partiellement réhabilité. Pour Dedet, Drieu se classe parmi les plus grands écrivains du XXe siècle, non pour des raisons politiques, mais pour ce qui fait la grandeur d’un auteur, soit la beauté de son œuvre.

Alors que plusieurs de ces textes sont inédits depuis leur parution originelle, certains en reconnaîtront quelques-uns déjà publiés dans les Cahiers de l’Herne et dans Pierre Drieu La Rochelle – Textes politiques 1919 – 1945 publié chez Krisis.

Au fil des textes, on découvre Drieu journaliste et chroniqueur, non pas le pamphlétaire de L’Émancipation Nationale présenté par Gallimard dès 1937, mais celui qui disserte sur la vie citadine, la justice, l’esthétisme, les voyages, les femmes et encore les femmes. Les sujets sont variés, voire hétéroclites, mais on y découvre ou redécouvre plutôt l’amant à l’amour éphémère fait certes pour le plaisir et la beauté, mais surtout pour les hauteurs, à la manière d’un Lindbergh qui lui aussi est resté jeune à jamais dans nos mémoires, défiant ainsi l’inévitable vieillesse et la décadence.

Paradoxalement, l’homme qui s’éprend de la beauté des corps, qu’il aimerait voir sculptés et chevaleresques, est en quête d’immortalité et de transcendance. Cette beauté et cet idéal surpassant tout, cette réponse définitive, ce fil d’Ariane qui relie ces textes disparates, n’est-ce d’ailleurs pas l’Europe ?

Son talent de conteur, comme on dit ici en Nouvelle-France (le Canada), lui permet de transformer en petit chef-d’œuvre quelque chose d’aussi banal qu’une entrée en cour pour un procès ou une discussion avec un ouvrier socialiste. Lyrique, mais analytique, expression qu’il emploie lui-même pour parler d’un de ses amis, il dénonce certains traits de la société. Comme le veut l’expression consacrée, cette critique est toujours actuelle, puisque, depuis l’époque de Drieu, plutôt que d’être corrigés, ces traits furent amplifiés et présentés comme des vertus à entretenir.

Il est lucide et parvient par un tour de force à toujours s’intéresser tant à l’arbre qu’à la forêt qui l’entoure, à l’individu et la masse dont il est indissociable.

En finissant ce recueil, on ne peut espérer qu’une chose ; qu’une autre surprise de ce genre survienne, qu’un autre éditeur parvienne à trouver de nouveaux inédits qui seraient à ce jour passés sous le radar.

Pierre Drieu La Rochelle, Chroniques des années 30, Les éditions de Paris, 142 p, 2016.

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