8 juin 2017

Clovis a de quoi pavoiser

Par Pierre de Laubier

 

Tout ce que nous avons dit à propos des Francs qui précédèrent Clovis est attesté, et on ne le raconte jamais. Tandis qu’à peu près tout ce qu’on raconte de lui est légendaire, et on le répète sans cesse.

Clovis le barbare

Clovis le barbare

Pourquoi ? Certes, les généraux francs qui avaient combattu pour l’empire et marié leur fille à l’empereur avaient quitté la Gaule. Mais d’autres y étaient restés. Entre eux et Clovis, il s’est toutefois écoulé un siècle au cours duquel les Francs furent éclipsés, entre autres raisons parce qu’ils étaient païens. On fait donc commencer l’histoire de Clovis avec les grandes invasions, sans se soucier de ses glorieux cousins dont on devrait pourtant se flatter…

En 406, les Francs ne déferlèrent pas sur la Gaule mais, profitant du désordre dû à la rupture du limes, ils se déplacèrent peu à peu vers le sud : les Francs ripuaires occupaient les bassins de la Moselle et de la Meuse, tandis que les Francs saliens s’avancèrent jusqu’à la Somme après avoir pris Tournai et Cambrai (qui, soit dit en passant, étaient en Gaule). Mais, dès 409, ils prenaient part à la défense du limes.

On ne sait pas grand-chose de Mérovée, grand-père de Clovis, chef d’une tribu des Francs saliens, les Sicambres. Mais avant d’en venir au petit-fils, intéressons-nous au fils : Childéric. Ce n’était pas n’importe qui, puisqu’il avait été l’un des meilleurs lieutenants d’Aetius. Au service de l’empire, donc.

En 481, Clovis, fils de Childéric, devint à son tour roi des Sicambres. Or, le général romain Syagrius avait profité de la mise à l’écart de Romulus Augustule pour se proclamer roi. Clovis se déclara alors vengeur de l’autorité impériale, toujours représentée par l’empereur de Constantinople, et vainquit Syagrius en 486. Ce qui restait de l’armée romaine passa alors sous ses ordres, et les villes se rallièrent à lui.

Paris lui ouvrit ses portes et il y établit sa résidence principale. Pas n’importe où : dans le palais de l’empereur Julien. C’est en tant que représentant de l’autorité impériale qu’il lui revint de défendre le pays contre une invasion des Alamans. Cela n’avait rien d’une guerre tribale : c’est en tant que général de l’empire qu’il remporta la victoire de Tolbiac, près de Cologne, en 496. La légende dit qu’au cours de la bataille, il s’écria : « Dieu de Clotilde, si tu me donnes la victoire, je me ferai baptiser ! » Ce qu’il faut retenir, c’est que cette légende est calquée sur celle qu’on rapporte de Constantin à la bataille du pont Milvius, en 312. Une bannière ornée d’une croix lui était apparue, accompagnée des mots : « In hoc signo vinces. »

Après sa victoire sur Alaric II près de Vouillé, en 507, Clovis reçut de l’empereur d’Orient les insignes de patrice et de consul, qui consacraient son rôle de délégué civil et militaire de l’empire. À sa mort, son royaume s’étendait des Pyrénées jusque bien au-delà du Rhin. Pas mal, pour le barbare hirsute, couvert de peaux de bêtes, que l’imagerie nous montre élevé sur le pavois par des guerriers braillards, sur fond de huttes de bois perdues dans des forêts sauvages.

On a voulu faire de Clovis un nouveau Vercingétorix, un héros bien de chez nous, moustachu comme un paysan auvergnat. Rien de plus faux. Clovis fut élevé sur le pavois, mais l’empereur Julien, lui aussi, l’avait été en 355, parce que cette coutume germanique (ou celte) était devenue partie intégrante des rites de l’empire.

Les chroniques de Pierre de Laubier sur l’« Abominable histoire de France » sont diffusées chaque semaine dans l’émission « Synthèse » sur Radio Libertés.

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Philippe Randa,
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